Dimanche. 8h30. Herbe et bagnoles blanchies par la gélée, ciel zebré de rose, il caille. Grosses chaussettes, Damart, une deuxième couche, une troisième couche, manteau, écharpe, béret, opération bibendum ok. 1h30 de route et le gros village de campagne, bien sympathique -brr- s'offre à nous. Loulou ne pouvait pas s'occupper de son châlet aujourd'hui pour cause de dernière fiesta avant la vie de bagnard de chef de petite entreprise qui démarre dès ce mardi. Les deux bonnes âmes soeurs, légèrement poires sur les bords, acceptèrent de rendre service. Bien mal nous en a pris!
Que dire du châlet, si ce n'est qu'il est rustique, qu'il fait froid malgré le mini-chauffage de fortune fourni, que loulou nous a laissé un bordel monstre et que nous avons déjà une demi-heure de retard. On arrange la masure et le présentoir de sorte d'attirrer le chaland; il va craquer, c'est sûr, quand il verra ces compositions, pots pourris, lampes et autres lanternes pas du tout kitsch... sauf que le kitsch, il était-là, devant nous, à déambuler. Courts sur deux pattes, gros nez, gros culs, fagotés à la mode des années 80, acnéiques chez les garçons et crises de teinture chez les filles. Elles avaient toutes la tignasse soit rose, soit violine. Pourtant, je ne pense pas qu'Yvette Horner était la marraine de l'opération-putains-de-châlets-de-Noël. Les fautes-de-goût défilent; font deux, trois, quatre aller-retour parce que le marché de Noël ne s'étend que sur quelques dizaines de mètres. Ils bouffent des frites, des hamburgers, des chocolats, des gaufres, des crêpes et boivent du vin chaud. Ils achètent des branches de sapin décorés, des tableaux-plâtre couleur pastel, des photos de chien ou bien des gros coquillages. Leur goût de chiotte est à la hauteur de leur physique ingrat.
Et ça braille avec ça! Des hauts parleurs déversent des chants de chorale et de karaoké de Noël à tue-tête, mais fermez-là nom de dieu!
Le temps passe si lentement, il n'y a qu'à regarder la faune. Le fou-rire n'est pas loin, forcément toute cette tension nerveuse faut bien l'évacuer; le passage une fois, puis une deuxième fois des demeurés locaux aura eu raison de notre sérieux. Malgré la petite voix intérieure qui n'arrêtait pas de dire que ce n'est pas bien de se moquer de ces personnes innocentes, leur trop grande laideur comme sortie des tableaux de Jheronimus Bosch ne pouvait qu' alimenter en nous un flot continu de larmes de rire. Accroupies dans la cahute pour que les "clients" ne nous voient pas, il nous a bien fallu une demi-heure pour nous calmer, un peu, d'autant que l'énorme animateur de la journée nous gratifiait de son insupportable logorrhée insipide. Le retour à la raison allait être long. "Nous organisons un loto, ouvert à tous, de France, de Belgique et de Navarre. Et ils ne seront que deux (il fait deux avec ses doigts) Navarre, ah, ah" QUEL gros con. " Quand je commence une animation, je suis à 67kg et quand je finis, je suis à 90,100, ah, ah" QUEL GROS con. "Tenez, tout à l'heure, si vous avez faim, et ben vous mettez des frites dans la crêpe, ah, ah" QUEL GROS CON.
L'expérience fut folkrorique, difficile, éprouvante et maintenant j'aurais toujours de la compassion pour les vendeurs enfermés dans leurs petits châlets de Noël.
Notre chiffre d'affaire s'est élevé à 35 euros...
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